Une montée sans fin
Jour 18 – Sidi Aïch - Sétif
150 km – 8h52 – 1836 D+
Le récit de mon road trip de 5000 km solo à vélo 🇫🇷 🇪🇸 🇩🇿 🇹🇳 🇮🇹 🇫🇷
Bon ben voilà, j’ai dormi sous ma tente, au moins je ne l’aurai pas trimballée pour rien. Je me suis endormi illico et je n’ai pas été gêné par le bruit de la circulation, il faut dire qu’avec l’étape que je me suis mis dans le cornet… Je me suis juste réveillé vers 3h car j’avais un peu froid, j’ai déplié mon duvet et je suis reparti direct avec Morphée. Réveil à 5 heures, faut pas rigoler. Avec une nuit sous la tente, il faut refaire tout le tralala avec les affaires à ranger à la bonne place, puis tout remettre comme il faut sur le vélo. Je prends mon temps sans me précipiter. Je décide de changer de maillot car celui d’Algérie est empreint de la transpiration de la veille. Je le mets quand même bien en évidence sur mon porte-bagage et j’enfile ma tunique bleue. L’étape d’aujourd’hui c’est l’amitié France-Algérie.
A 6h30, je repars sur la nationale vers Bejaia. C’est très roulant, je file à 23 km/h de moyenne. Je n’avais plus l’habitude ! Il y a déjà pas mal de trafic, j’ai l’impression que cela ne s’arrête jamais. Je décide de tracer d’une seule traite jusqu’à Bejaia puis d’essayer de trouver un hôtel pour petit déjeuner et avoir du Wifi. J’arrive à Bejaia en moins de temps qu’il faut pour le dire. Et alors que j’arrive à l’entrée je vois une grande enseigne « Hôtel Sarrazin ». Ni une ni deux, je tourne à gauche et j’entre pour demander si je peux juste petit déjeuner. C’est possible, ouf ! Et ils ont du Wifi, je vais pouvoir rattraper mon retard. Je reprends mon texte car hier soir j’étais naze et un peu stressé. Le résultat est meilleur du coup. Tant-mieux pour vous. Je prends mon temps et je déjeune bien. Ensuite je pousse jusqu’à Bejaia centre et le port, histoire de pas partir sans avoir vu un bout de cette ville. C’est très joli, ça mériterait une visite plus longue, mais à vélo pas toujours possible. Surtout si on veut avaler pas mal de kilomètres.
J’ai eu Arezki au téléphone peu avant d’arriver à Bejaia, c’est mon GPS à distance ! Oui parce qu’aujourd’hui j’ai décidé de me passer de Komoot, ça lui apprendra à vouloir me faire prendre des chemins de traverse. Ça va être une journée nationale, la RN9 en l’occurrence. Mais bon hors de question d’endurer les galères à longueur de temps. Je dois être stratège pour avancer. La RN9 longe la mer un bon bout de temps et c’est très chouette, l’eau est turquoise. Cette côte est vraiment très belle et la route continue à être plutôt plate, vers 11h je m’achète 3 figues que j’attache avec leur sac plastique à mon guidon. Elles ont un goût bien fruité et je sais que niveau énergétique c’est top. J’arrive à Tichi, c’est super animé, il y a même un énorme bouchon que je double avec bonheur avec Black. C’est tout plein de restaurants mais il est à peine 11h30, trop tôt pour s’arrêter. En même temps, je ne sais pas trop ce qui m’attend et je n’ai pas mangé un vrai repas depuis avant-hier. Je roule encore un peu et à midi je décide de m’arrêter manger. Je vois un restaurant qui fera l’affaire et je mange un méchoui avec du riz et des crudités. C’est parfait. Pendant que je mange, je me rends compte que je suis pile-poil à la moitié de mon voyage : 17 jours et demi. J’ai parcouru 2374 kilomètres exactement, il m’en manque un peu pour être chez moi pour l’autre moitié, je me dis que mon premier objectif c’est le Vatican et après j’aviserai.
Je repars 45 minutes plus tard, j’en suis à 65 kilomètres. J’espère en faire 150 pour atteindre Sétif.
J’ai bien fait car juste après la RN 9 s’engouffre dans les massifs montagneux. A partir de Souk El Thenine, la route commence à s’élever un peu, les montagnes sont magnifiques, très vertes avec des parties rocheuses. J’arrive dans la ville de Darguina et les pourcentages augmentent. La mosquée est très jolie, je la capture. Ça circule énormément sur cette nationale, c’est un vrombissement incessant et il faut toujours être sur ses gardes. Juste après je vois un marchand d’articles de plage perdu au milieu des montagnes. Son stand a du cachet. Il y a vraiment des vendeurs partout le long de la route. Certains sont spécialisés comme mon vendeur de figues, d’autres ont plusieurs spécialités. Ils sont souvent près des dos d’ânes. En parlant d’eux, ils continuent à m’exaspérer. Ils sont partout, mes sacoches souffrent énormément. J’ai une attache qui saute un peu trop souvent. Ça m’oblige à m’arrêter à chaque fois.
La route continue à être montante. C’est du 4 à 6% globalement, ça me change de la veille. Un peu avant 15h, un tunnel se présente à moi. C’est pas terrible, mais bon… ça m’évitera de gravir encore des côtes impossibles. J’y vais. Il est assez sombre, et bien sûr les voies sont un peu plus rétrécies que sur la route normale. Le début est spécial, j’enlève mes lunettes pour mieux voir. Les voitures et camions passent près de moi, mais j’ai vu hier que mes sacoches avec leurs bandes réfléchissantes font leur effet. Par contre, la côte continue à être de 5 à 6%, c’est dur, il faut rester le plus près possible du bord et petit à petit cet environnement fermé, avec des gaz d’échappement qui sont très loin de nos normes européennes, me donne la nausée. J’hésite entre ralentir pour diminuer mes volumes respiratoires ou accélérer pour sortir de là le plus vite possible. Finalement je fais un mixte. Mais j’en sors pas, c’est long long long. A un moment je vois de la lumière du jour. Je me dis OUF sauvé. Mais je me rends compte que c’est juste une petite ouverture de 50 mètres entre deux portions du tunnel. Il y. a un espace pour sortir avec un petit local électrique et un peu d’ombre. Je m’arrête pour respirer un air normal quelques minutes. Je suis exténué. Je prends le temps de me reprendre, de boire beaucoup. Après 10 minutes, je dois retourner au combat, j’imagine que cette deuxième portion est quasi identique à la première. Ça va être chaud, mais je n’ai plus le choix. Les véhicules vont moins vite à cause de camions qui traînent un peu plus, tant mieux, je me sens plus en sécurité dans un trafic lent. Par contre niveau gaz d’échappement c’est pire. Au bout de quelques minutes, je sens que ça atteint mes poumons, j’ai des haut-de-cœur. C’est juste horrible. Vous imaginez bien que je ne risque pas de sortir mon téléphone pour immortaliser ce moment. C’est le tunnel de la mort, j’hésite entre une mort par asphyxie ou par un choc violent… Je courbe l’échine, je crois à ma bonne étoile et je continue d’avancer dans cette atmosphère invivable en espérant voir le bout du tunnel. Comme cette expression est appropriée. Enfin je devine une luminosité un peu plus forte. Il était temps, j’ai failli vomir à deux reprises sur mon vélo. Il y a un espace pour se garer et admirer la vue sur les gorges. Moi je pose Black contre la balustrade et je pars vomir quelques mètres plus loin. J’ai l’impression d’avoir cumulé deux ans de tabagisme en trente minutes. Je récupère un peu grâce à, l’air respirable. C’est vrai que l’endroit est sublime avec ces gorges profondes. Une fois bien hydraté je repars. Au bout de 500 mètres j’ai un nouveau tunnel devant moi. Oh non pas possible ! Heureusement il est plus court, l’air y est beaucoup moins saturé. Je peux respirer.
Après toute cette montée, je me dis que ça va bien descendre à un moment. Mais non. Il fait très chaud, je fais très souvent des pauses pour souffler. Lors de l’une d’elles un homme m’a dit qu’on était entre 40 et 42°. Je me suis acheté une bouteille d’eau congelée et ça me permet d’entretenir la fraicheur de mon eau. C’est vraiment l’idéal et ça m’a peut-être sauvé ma fin d’étape. Car la montée ne cesse jamais, l’heure passe en revanche. Je me dis que ça va bien redescendre. J’ai bien à un moment une petite descente, mais elle ne dure pas. Lors d’une pause encore je regarde les informations sur la ville de Sétif, et en fait elle se situe à 1100 mètres d’altitude. En attendant, ça monte, ça monte et ça monte encore. Mes quadriceps commencent à être bien gonflés. Je me mets en danseuse régulièrement pour les soulager et aussi pour mes fesses sur la selle. A 19h je suis à 19 kilomètres de Sétif, mais dix-neuf kilomètres ça veut rien dire entre de la montée ou de la descente. Et je vous le donne en mille, c’est de la montée encore et toujours. Elle ne se termine jamais. Je prends sur moi, je maintien l’effort pour pas arriver trop tard. Je m’arrête de temps en temps pour récupérer, niveau muscles et niveau souffle. J’arrive enfin au sommet du col de Teniet qui culmine à 1180 mètres. Pas si éloigné de la ville de Sétif. J’espère vraiment maintenant ne pas avoir une grande descente pour une grande remontée. Mais en fait j’arrive sur un plateau avec des montagnes arides parsemées de pins. C’est très joli aussi. Juste après ça descend un peu quand même mais c’est pas fou-fou. J’approche tout de même de Sétif, dans un de ces satanés dos d’âne, ma sacoche saute encore. Je dois m’arrêter. Je me dis que je vais en profiter pour checker un hôtel mais mon tel est totalement déchargé. Tant pis j’irai au centre et je trouverai bien. Quelques kilomètres avant d’arriver dans le centre-ville, c’est reparti pour une petite grimpette. Encore 3 kilomètres pour finir cette étape. Il fait nuit, il est 20h30, il faudrait pas que je prenne l’habitude des étapes de nuit, c’est pas la SaintéLyon.
Je vois un grand hôtel au loin, je le cible. A 20h45 je suis au check in. C’est tard, je suis bien vanné. J’aimerais bien une petite étape un peu plus tranquille. Mais je ne crois pas que ce doit au menu des prochains jours. En tout cas personne ne m’avait prévenu de ce tunnel, même pas GPS Arezki ! Peut-être que je vais redonner sa chance à Komoot demain ! Sétif est très animée en tout cas, je pense qu’après avoir terminé mes petits posts je vais manger en ville. Il y a des pétards et des feux d’artifices de particuliers un peu partout, j’en ai déjà vu et entendu sur ma route aujourd’hui. Je questionne le mec de l’hôtel et en fait les jeunes fêtent leur Bac.
Bilan de la journée. Encore beaucoup de dénivelé, des paysages magnifiques, un tunnel horrible et au moins 8 litres d’eau que j’ai bue pour supporter ce dénivelé et cette chaleur.
Je vais étudier mon parcours de demain, c’est sûr que j’aurai Constantine à mon menu.
Depuis plus de 10 ans, j’ai accompagné plus de 250 personnes à atteindre leurs objectifs physiques et mentaux grâce à une analyse morpho-anatomique et des programmes individualisés.
3 moisCourage Guillaume, Force et Honneur 💪
EU Project Manager
3 moisQuel courage !